- WALLENSTEIN (A. von)
- WALLENSTEIN (A. von)WALLENSTEIN ALBRECHT VON, duc de Friedland (1583-1634)Personnalité complexe, Wallenstein, général allemand, condottiere longtemps heureux, gentilhomme de Bohême, aventurier qui se laisse guider par les astres, a eu un destin qui suscite maints commentaires. Issu d’une bonne famille de Moravie, il appartient par ses origines, son éducation, ses premières années à la société aristocratique de l’ancienne Bohême dont il illustre les contradictions et la complexité. Contradictions religieuses d’abord: sa mère, une Smiricka, appartient à une ancienne famille tchèque protestante, une de ses sœurs est la quatrième femme de Karil de Zerotin, chef du parti protestant morave, et pourtant Wallenstein a été élevé dans la religion catholique. Contradiction de nationalité, voire de culture: son nom s’écrit sous trois formes, en tchèque Valdstyn, en allemand Waldstein ou historiquement Wallenstein; élève des jésuites d’Olomouc, cultivé et amateur d’art, il s’affirme constructeur, collectionneur, prince de la Renaissance. Complexité psychologique enfin: c’est un militaire qui, de bonne heure, a servi en Hongrie, contre les Turcs, puis dans l’armée de Ferdinand de Styrie contre les Vénitiens; fidèle à l’empereur, il participe aux opérations de Moravie en 1618 et 1619; mais il est aussi homme d’argent, administrateur, amoureux de la spéculation; son homme d’affaires, Hans de Witte, qui l’entraîne dans le consortium des monnaies, trouve ses profits dans la ruine générale; il donne à l’armée son ravitaillement, sa solde et son crédit.Sa destinée est liée à la guerre de Trente Ans. À l’origine, on trouve les femmes: sa première épouse, Lucrèce Neksovna, meurt en 1614 en lui laissant sa fortune; la seconde, Isabelle de Harrach, d’une vieille famille tchèque, est la sœur d’un conseiller de Ferdinand II. Il s’y ajoute une offre, celle d’une armée, qu’il fait à l’empereur démuni. Enfin des victoires: sur Mansfeld d’abord à Dessau en 1626 (la paix de Presbourg est signée avec Gábor Bethlen), dans les pays de la Baltique ensuite avec la conquête du Sleswig, du Holstein et des deux Mecklembourg; il échoue devant Stralsund qui accueillera Gustave Adolphe; il reçoit néanmoins le titre d’amiral de la mer Océane et Baltique. Il a pris le titre de duc de Friedland. Sa puissance effraie les Électeurs qui, à la diète de Ratisbonne de 1630, aiguillonnés par le père Joseph, représentant de la France, exigent de l’empereur sa destitution. Première chute dont il savoure l’amertume — «l’Empereur et toute sa Maison sentiront dans la douleur ce qu’il en coûte d’outrager un gentilhomme» —, suivie d’une remontée spectaculaire au moment de son rappel consécutif aux victoires du roi de Suède débarqué en Allemagne et de la défaite de Tilly à Breitenfeld (17 sept. 1631). C’est le début de ce qu’il est convenu d’appeler «la conjuration de Wallenstein» qui n’est que le développement des forces de tous ordres, astrologiques, caractérielles, territoriales, politiques, accumulées par le général au cours de son ascension en sa qualité de prince d’Empire, exaspérées par la conjoncture militaire et par le brutal renvoi de 1630: ravages de l’orgueil, attitude de défi, réflexe de défense en prévision d’un nouvel affront joint au désir du gain, à l’ambition territoriale, au vertige du jeu dans une anarchie généralisée où tout semble possible. Langue est nouée avec les émissaires de Saxe, du roi de Suède, de Richelieu, mais le sol se dérobe. Gustave Adolphe remporte à Lützen la victoire où il trouve la mort, et la tentative de création d’un «tiers parti» est rapidement connue à Vienne. Le 25 février 1634, Wallenstein, abandonné de son armée, est assassiné par quelques officiers. C’est la fin de la conjuration, du rêve bohémien, des intrigues saxonnes, suédoises et françaises, mais c’est surtout le dernier acte d’un drame — tel que l’a vu Schiller dans la trilogie qu’il consacre à Wallenstein —, reflet de la crise morale et politique, autant que matérielle, où se débat l’Empire.À la fin du XVIIIe siècle, un de ses lointains descendants, le comte Waldstein, favorisera puissamment les débuts musicaux du jeune Beethoven à Bonn, l’enverra étudier à Vienne et l’introduira dans les cercles de la haute noblesse viennoise; en reconnaissance, Beethoven lui dédiera la Waldstein-Sonate opus 53.
Encyclopédie Universelle. 2012.